Sur le plateau de télévision nationale, le virtuose a estimé que les médias occidentaux mentaient et qu’il fallait couper l’électricité à Kiev.
Pianiste russe de renommée internationale, Boris Berezovsky souhaite voir s’accentuer la pression sur la ville de Kiev, menacée d’un siège par les forces armées russes depuis trois semaines. «Je comprends que nous ayons pitié des Ukrainiens, que nous y allons doucement, mais ne devrions-nous pas faire preuve de davantage de fermeté, les encercler et leur couper l’électricité ?», a-t-il proposé jeudi 10 mars, sur la chaîne de télévision nationale Pervy Kanal.
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La sortie du musicien, radicale même dans le contexte des médias russes, a déstabilisé un officier également invité à l’émission. Celui-ci a aussitôt coupé la parole à Boris Berezovsky en rappelant l’absolue nécessité d’éviter toute «catastrophe humanitaire» en Ukraine. «L’important, c’est de gagner la guerre de l’opinion en Russie, après quoi le monde entier nous comprendra», a commenté l’officier. Sur la même chaîne de télévision, une manifestante brandissant une pancarte contre la guerre en Ukraine a brièvement interrompu le journal télévisé russe, lundi, avant d’être placée en détention.
«Soft power» musical
La proposition de Boris Berezovsky, que le pianiste a énoncé en prenant gare de rappeler qu’il n’était pas militaire, mais pianiste, a provoqué l’indignation de ses collègues. «Je suis abasourdi de ces déclarations de mon ancien ami Boris B. Mais je les entends sortir de sa bouche», s’est stupéfait sur Twitter le pianiste et chef d’orchestre allemand Lars Vogt. «Cette amitié est officiellement terminée», a précisé le musicien qui dirige actuellement l’Orchestre de chambre de Paris. «Ce que je vois et ce que j’entends, c’est juste insupportable», a également confié le pianiste français François-Frédéric Guy à France Musique. Ça nous a presque tous, les collègues, la profession et au-delà, mis très mal à l’aise.»
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En réaction à l’annulation, début mars, de plusieurs concerts internationaux du jeune pianiste russe Alexander Malofeev, le patron de la Folle Journée et du Festival de La Roque d’Anthéron René Martin avait appelé à ne pas stigmatiser les artistes russes qui n’ont pas de liens particuliers ni ne soutiennent le président Vladimir Poutine. «C’est pourquoi il nous paraît essentiel de poursuivre cette riche collaboration avec les artistes russes», avait-il déclaré le 11 mars sur Facebook, en citant une liste de musiciens commençant par… Boris Berezovsky. Le pianiste virtuose de 53 ans, pur produit du conservatoire de Moscou et des dernières classes soviétique, lauréat en 1990 du concours international Tchaïkovski était, il est vrai, davantage connu pour la maestria de sa patte que pour ses prises de position politique. Il ne s’était jusqu’à présent pas exprimé sur le conflit russo-ukrainien.
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